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Volcans et sécurité aéronautique

Antonio Rodríguez-Laiz

Antonio Rodríguez-Laiz

AERTEC / Marketing & Communication

 

Au cours des 35 dernières années, près d’une centaine d’appareils commerciaux ont subi des dommages en vol, en raison de la présence de nuages de poussières volcaniques. Parmi les incidents les plus connus figurent celui du Boeing 747 de British Airways dont les 4 moteurs ont arrêté de tourner, en juin 1982, lors de son passage au-dessus de l’Indonésie. Le même type d’incident s’est reproduit sur un autre 747, de KLM, tandis qu’il survolait l’Alaska quelques années plus tard. Les coupables de ces deux incidents n’étaient autres que les volcans Galunggung et Redoubt.

La nature ne nous offre que rarement un spectacle aussi saisissant que l’éruption d’un volcan. Une telle image, contemplée la nuit, est difficile à effacer (veuillez en croire mon expérience). Pourtant, comme dans d’autres aspects de la vie, cette beauté constitue également une menace. Car, outre le danger que représente l’éruption en elle-même, il en existe un autre qui touche tout spécialement le monde de l’aéronautique : les nuages de cendres.

blog-infografia-volcanos-ENG-01Un évènement récent a suscité un engouement et une curiosité jamais vus auparavant pour ce type de phénomène : l’éruption du volcan islandais Eyjafjallajökul en 2010. Mais il en existe d’autres moins connus, comme celles du Popocatepetl (Mexique), de l’Etna (Italie), du Sangeang Api (Indonésie), du Puyehue (Chili) ou de l’Ubinas (Pérou), ainsi qu’une dizaine d’autres qui ont eu, entre autres conséquences, la suppression de tous les vols des appareils situés à proximité, en raison de la menace que constituait l’émission de cendres.

L’exemple du volcan islandais a été particulièrement significatif. Celui-ci a entraîné la plus vaste fermeture de l’espace aérien depuis la seconde guerre mondiale, causant un impact de 1700 millions d’euros aux compagnies aériennes européennes et une perte du PIB mondial évaluée à 5 milliards de dollars.

Contrairement à ce que certains pensent, le problème ne réside pas dans le fait, peu probable, que l’éruption puisse anéantir littéralement tout avion qui passerait au-dessus d’elle ou que la chaleur de la lave en fusion (entre 700 et 1200 degrés centigrades) puisse faire fondre les objets se présentant sur son passage. Jamais un appareil ne sera autorisé à approcher suffisamment un volcan pour qu’une telle circonstance puisse se produire. Le danger auquel nous faisons référence, dont les conséquences géographiques peuvent être de l’ordre du continent, est la cendre expulsée par le volcan.

Mais en quoi les cendres volcaniques représentent-elles un danger pour les avions ?

Il existe quatre raisons essentielles à cela:

  • Les cendres peuvent s’accumuler et fondre à l’intérieur des moteurs à réaction, dont la température intérieure dépasse la température de fusion des particules. Ceci provoquerait la création de nouveaux cristaux qui, s’ils restaient adhérés à certaines parties du moteur, entraîneraient son interruption définitive.
  • Les cendres sont extrêmement abrasives et peuvent, par conséquent, endommager les parties sensibles des moteurs, entraînant le même résultat.
  • Elles peuvent donner lieu à des erreurs dans la lecture du fonctionnement de l’appareil.
  • L’invisibilité de certains nuages de cendres qui, du fait de leur faible densité et de la taille de leurs particules, risquent de ne pas être visibles à l’œil nu (leur taille varie généralement entre 500 micromètres et 2 millimètres).

Tous les volcans ne sont pas potentiellement aussi dangereux. Ceux de type « hawaïen », dont certains sont les plus actifs historiquement parlant, n’émettent pas de cendres. Par contre, les volcans de type « Vulcanienne ou Vesubian » représentent une réelle menace, aussi bien pour leur type d’éruption que pour l’habituelle émission de cendres et autres phénomènes associés.

En réponse au fait reconnu selon lequel les incidents aéronautiques précités sont causés par des nuages de cendres, l’OACI, en collaboration avec l’OMM (Org. météorologique mondiale), a fondé en 1987, l’IAVW (International Airways Volcano Watch), afin de surveiller, le long des voies internationales, les volcans susceptibles de constituer un danger pour le trafic aérien. Depuis, une série de directives et de procédures opérationnelles ont été adoptées en vue de minimiser les conséquences des éruptions et d’augmenter la sécurité.

Suite à l’éruption volcanique qui s’est produite en Islande en 2010, l’OACI a également chargé l’IVATF (l’Équipe spéciale internationale sur les cendres volcaniques) d’examiner les besoins de l’aviation civile afin d’anticiper ce type d’évènements et d’identifier les mesures à prendre dans chaque cas. L’organisation a également désigné neuf centres météorologiques régionaux spécialisés, pour le contrôle des cendres volcaniques (Londres, Toulouse, Montréal, Washington, Anchorage, Tokyo, Darwin, Wellington et Buenos Aires). Ces centres divulguent généralement trois types d’informations standards :

  • Avis de cendres volcaniques, VAA
  • Avis de cendres volcaniques sous forme graphique, VAG
  • Modèle de prévision de trajectoire, HYSPLIT

Parallèlement aux travaux des agences gouvernementales, certaines entreprises consacrent d’importants efforts à la RD afin de mettre au point des outils permettant la détection précoce de l’éventuelle présence de cendres volcaniques dans l’air, ce qui permet d’agir à titre préventif.

L’exemple le plus récent de ce succès a été développé par un groupe à la tête duquel se trouve Airbus et qui a également compté sur la participation d’entreprises telles qu’Easyjet ou Nicarnica Aviation. Il vient de tester un système produisant d’excellents résultats : le dénommé AVOID, une fois installé sur l’appareil, est non seulement capable de détecter la présence de cendres à 60 km de distance, mais encore de révéler à l’avance des informations relatives à leur densité, leur concentration et leur emplacement. Disposer de cette information suffisamment à l’avance permet non seulement d’avertir le personnel navigant de la présence d’un éventuel danger, mais aussi de mettre en place un protocole adapté, qui permette de réduire au maximum les effets d’un tel danger sur le vol.

Le système AVOID est un dispositif qui fournit des informations en temps réel à partir d’un échantillonnage rapide de la projection d’images de caméras infrarouges synchronisées. Les informations obtenues sont associées aux informations du GPS et aux données relatives à la vitesse de l’air, ce qui permet de dresser une carte tridimensionnelle du nuage de cendres et de sa trajectoire prévue. Cette technique permet, de jour comme de nuit, de détecter des nuages de cendres à une distance d’entre 50 et 100 km, en fonction de la concentration de celles-ci. En vitesse de croisière classique, ceci laisse une marge de manœuvre de 7 à 10 minutes au pilote de l’appareil.

Ces informations, qui sont d’une grande utilité pour l’avion qui les obtient et les interprète, peuvent être retransmises aux centres régionaux et, de ce fait, être communiquées aux appareils dépourvus de ce système.

Contrairement à ce qu’imaginent certaines personnes, la plupart des phénomènes naturels ne peuvent pas être maîtrisés. Mais il est certain que la technologie et l’expertise sont les principaux facteurs qui permettent de minimiser leur impact. De son côté, l’industrie aéronautique compte parmi ses objectifs prioritaires l’adoption de mesures appropriées dans les domaines de l’information, l’organisation, la prévention et l’innovation, afin de maintenir la sécurité à son plus haut degré.

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